Manger la culture colonisatrice, telle est la revendication du Manifeste anthropophage écrit au Brésil par Oswald de Andrade, en 1928. À travers ce texte savoureux et volontiers polémique, le poète prône la dégustation symbolique du colonisateur, affirmant la modernité brésilienne dans un processus de dévoration esthétique et politique qui consiste non pas à singer la modernité européenne mais à l'assimiler pour en forger une déclinaison singulière. Ce faisant, De Andrade ouvre la voie à une modernité brésilienne riche et insoumise, dont nous verrons certains des plus grands représentants, parmi lesquels Lygia Clark et Hélio Oitica.